Introduction
À l’automne 2020, l’université a dû faire face à un second confinement relié à l’épidémie de SRAS-COV2. Ce confinement a contraint des enseignants à ré-envisager tous leurs enseignements à distance sans délai. Cependant, enseigner à distance dans le cadre d’un cours envisagé en présentiel constitue un véritable défi (Bonfils, 2020 ; Villiot-Leclercq, 2020). L’enseignant se doit dans certains cas de reconsidérer ses contenus, ses attentes en matière de productions étudiantes et d’évaluations. Dans ces conditions, nombreux sont les enseignants qui n’ont pas maintenu leur dispositif initialement envisagé et cela pour plusieurs raisons.
La première est que certains enseignants sont attentifs et/ou attachés à l’égalité des chances (matérielles notamment). Cette égalité s’inscrit dans l’idée, répandue depuis le XVIIIe siècle en Europe, qu’il existe une égalité des droits au sein des systèmes éducatifs. Ces systèmes se doivent d’offrir des conditions identiques de formation, d’information et d’évaluation à tous.
La seconde raison est que certaines compétences (orales notamment) et leur apprentissage constitue un enjeu déterminant (Gaussel, 2017) pour certaines disciplines (ex : les langues maternelles et étrangères). La mise à distance spontanée des enseignements reconditionne ces apprentissages et demande la mise en place d’innovations pédagogiques (Cniré, 2017), non anticipées et pas toujours maitrisées.
Enfin, la troisième raison est liée au fait que l’intégration du numérique dans la mise en place des enseignements nécessite des compétences pédagogiques, didactiques, numériques (Koelher et Mishra, 2009) et que l’évaluation (Le Cunff et Jourdain, 1999) ne fait pas toujours partie des priorités (Demeuse et Aubert-Lotarski, 2007) dans la formation professionnelle enseignante.
Afin de soutenir les pratiques de l’enseignant se retrouvant malgré lui obligé de mettre en place un dispositif à distance, nous présentons le résultat d’une réflexion portant sur les postures enseignantes mises en œuvre face aux difficultés des étudiants apparues en distanciel. Plus particulièrement, nous présentons l’analyse d’une expérience menée au sein de l’IUT de Béziers qui s’échelonne entre septembre et décembre 2020. Elle visait à faire produire un portfolio par les étudiants à partir des compétences qu’ils ont pu développer au cours de quatre cours qui se sont déroulés en présentiel en début d’année universitaire. La création de ce portfolio s’est déroulée à la suite de ces cours, en présentiel puis en distanciel.
Après avoir présenté le cadre théorique de la posture enseignante et de l’approche par compétences, nous décrivons le contexte de formation et plus particulièrement le scénario pédagogique qui a permis aux étudiants de produire leur portfolio. Ensuite, à partir de la méthodologie d’analyse des données recueillies, nous caractériserons les changements de postures qui sont apparues nécessaires afin de soutenir ces pratiques apprenantes en contexte distanciel.
Cadre théorique
Notion de posture
La notion de posture, empruntée à l’italien postura (qui signifie « position » ou « disposition ») est peu étudiée en profondeur (Deschryver, Lameul, 2016). Elle apparaît communément comme employée au sujet de réalités communes. On parte de « posture d’un auteur », de « posture critique/divergente » sans qu’il soit possible de lui donner un contour bien défini (Saint-Amand et Vrydaghs, 2011).
Le corps, comme objet de médiation, s'enrichit de ces multiples « postures » que nous assimilons progressivement. Certains d'entre nous se souviennent certainement de l'obligation de « se tenir droit » ou de « ne pas mettre les coudes sur la table ». Nous avons donc acquis un certain nombre de postures corporelles qui répondent à des normes sociales intentionnelles intervenant dans un contexte particulier. Le corps se positionne donc différemment selon l'endroit où il se trouve, selon les personnes (autres corps) :
« En outre, tous les principes de choix sont incorporés, devenus postures, dispositions du corps : les valeurs sont des gestes, des manières de se tenir debout, de marcher, de parler. La force de l'ethos, c'est que c'est une morale devenue hexis, geste, posture » (Bourdieu, 1978, p.134).
Il est cependant réducteur de restreindre la notion de posture à celle du corps. Nous entendons et verbalisons l’expression « être en bonnes ou mauvaises postures », « posture offensive/défensive » ou encore « postures réflexives » qui désigne :
« la situation dans laquelle agit un professionnel, tout autant que le système d’attitudes qu’il adopte dans cet exercice » (Mulin, 2013, p.214).
Lameul (Lameul, 2008 : p 89 cité par Deschryver et Lameul, 2016) définit la posture comme une
« manifestation (physique ou symbolique) d’un état mental. Façonnée par nos croyances et orientée par nos intentions, elle exerce une influence directrice et dynamique sur nos actions, leur donnant sens et justification ».
À travers cette définition, nous percevons à la fois l’aspect dynamique de la posture située à l’interface de diverses représentations (croyances et intentions) et l’orientation vers l’action à laquelle cette posture donne du sens (justifications des choix réalisés). La posture semble être forgée en grande partie par nos histoires personnelles, nos expériences antérieures et parmi elles les habitudes que nous avons élaborées.
Chez l’enseignant, ceci revient à dire que sa posture dépend de son histoire personnelle (Albero et al., 2009), de son passé scolaire (disciplinaire et relationnel) et périscolaire (activités sociales personnelles), de ses habitudes de pratiques professionnelles soutenues par ses intentions et ses représentations reliées à son métier. Cette vision rejoint les travaux menés par Bucheton et Soulé (2009) qui s’inspirent de la didactique du français (Bucheton et Bautier, 1997) et dans lesquels ils mobilisent la théorie des concepts en actes de Vergnaud (1996).
Six postures de Bucheton et Soulé : en présentiel et à distance
Pour Bucheton et Soulé (2009 : 38) la posture est un :
« schème préconstruit du “penser-dire-faire”, que le sujet convoque en réponse à une situation ou à une tâche scolaire donnée. La posture est relative à la tâche mais construite dans l’histoire sociale, personnelle et scolaire du sujet. ».
Ces auteurs présentent plus particulièrement une palette de six postures d’étayage que le sujet (enseignant) peut mobiliser pour réaliser une tâche : le contrôle, le contre-étayage, l’accompagnement, l’enseignement, le lâcher-prise et la posture du magicien.
La posture de contrôle se manifeste par un cadrage de la situation ce qui se traduit par plusieurs éléments observables : les activités ont lieu généralement avec l’ensemble des apprenants (groupe classe) qui avancent tous en même temps en fonction des consignes fournies par l’enseignant. En présentiel, l’enseignant s’efforce de répondre aux sollicitations des apprenants tout en maîtrisant l’avancement de tous, envisagée en amont. Dans l’enseignement à distance, cette posture peut prendre forme lors de visio-conférences de réponses destinées à tous les groupes aux questions liées à une tâche devant être réalisée.
La posture de contre-étayage se manifeste par une prise en charge par l’enseignant de certaines tâches ou sous-tâches demandées à l’apprenant. Cette posture se manifeste par un enseignant qui réalise des actions à la place de l’apprenant. Elle a souvent pour but de permettre à un apprenant de rattraper le groupe. En présentiel cette posture peut prendre la forme pour l’enseignant de l’installation d’un logiciel dans le sens ou cette installation ne constitue pas l’objectif principal de la séance de travail mais lui est indispensable. En distanciel, par cette posture l’enseignant fournit un tutoriel d’installation avant la séance ou encore accompagne pas à pas un apprenant à partir d’un partage d’écran par exemple.
La posture d’accompagnement apparaît comme laissant du temps à l’apprenant de comprendre afin qu’il puisse trouver les réponses autant que possible par lui-même. L’action de l’enseignant a pour but de provoquer des discussions entre les apprenants afin de les amener à confronter leurs points de vue et développer une prise initiative. Ici, l’enseignant est en position d’observateur. Il délimite un champ des possibles et laisse les apprenants agir et interagir entre eux et avec lui. Dans un dispositif distanciel, cette posture peut prendre la forme de phases d’observation d’échanges qui ont lieu par exemple en sous-groupes (division de groupes en visio-conférences ou travaillant sur un document partagé).
La posture d’enseignement est essentiellement centrée sur la synthèse et la conceptualisation. Cette posture va permettre à l’enseignant de formuler et de verbaliser les savoirs qui ont été abordés au cours de la séance. Contrairement aux postures de contrôle et de contre-étayage, la posture d’enseignement a lieu sur des périodes très ciblées telles que la fin d’une séance. Elle s’inscrit sous la forme d’un résumé tout en envisageant des prolongements envisagées ou envisageables. Cette posture a pour objectif faire prendre conscience de l’avancée réalisée et des perspectives de travail dans une dynamique d’amélioration continue et de mise en lien avec d’autres disciplines, d’autres activités déjà menées ou à venir. Cette posture peut prendre la forme, en présentiel et en distanciel, d’un document de synthèse rédigé par l’enseignant à l’ensemble des apprenants à partir des observations qu’il a réalisées au cours de la séance ou encore d’un document bibliographique incitant les étudiants à poursuivre le travail par des lectures. Dans un dispositif à distance, tous ces documents peuvent être déposés sur une plateforme LMS[1] qui offre la possibilité à l’apprenant de les consulter plus tard s’il le souhaite.
La posture de lâcher-prise est un prolongement et un renforcement de la posture d’accompagnement. Elle vise à rendre les apprenants responsables de leur travail tout en les autorisant à expérimenter, échanger et prendre des décisions argumentées. L’enseignant incite le groupe à s’autogérer, réfléchir sur des hypothèses qu’ils formulent et les conséquences de leurs choix. L’enseignant se refuse d’intervenir dans les orientations prises et mais interroge l’apprenant au niveau des justificatifs de ces choix. À distance, cette posture est facilitée par l’utilisation d’un LMS laissant par exemple à l’apprenant une période au cours de laquelle il pourra déposer les travaux attendus lorsqu’il le souhaite, pour effectuer des recherches documentaires en ligne et en laisser une trace sur la plateforme, ou encore consulter diverses ressources numériques éducatives au moment où il le trouvera opportun.
Enfin, la posture dite du « magicien » mobilise les jeux, les gestes théâtraux, les récits et anecdotes personnels visant à attirer l’attention des apprenants. Ici, l’enseignant ouvre par cette posture la voie aux interactions avec les apprenants mais aussi avec d’autres acteurs pouvant intervenir dans leurs séances de formation (un autre enseignant, un ancien étudiant, un professionnel, etc.) offrant la possibilité de mettre en scène (corporellement / visuellement / émotionnellement) sa situation et/ou de solliciter chez l’apprenant de nouvelles stratégies de résolution de problèmes. À distance, la posture du magicien, comme en présentiel, peut amener l’enseignant à interagir avec d’autres acteurs, mettre en œuvre des métaphores ou encore des innovations technologiques (ex : réalité augmentée, virtuelle).
Parmi ces six postures, celles d’accompagnement, de lâcher-prise et de magicien représentent celles qui semblaient les plus adaptées dans la mise en place de l’approche par compétences visée dans cette expérience.
L’approche par compétences
L’Approche Par Compétences (APC) vise à construire l'enseignement sur la base de savoir-faire, évalués dans le cadre de la réalisation d'un ensemble de tâches intégrées à des situations complexes (authentiques) positionnant l’apprenant au centre de ses apprentissages. Cette approche impulse de profonds changements dans les pratiques qui se situent notamment au niveau des modalités de transmission et de l’aide apportée à l’appropriation des connaissances chez chacun des apprenants. Elles constituent un nouveau cadre de référence, « qui tente de dépasser certaines limites de la pédagogie par objectifs. » (Parent et al., 2012 : 183). Même si ce mode de conception de l’enseignement (Monchatre, 2008) n’est ni nouveau (Crahay, 2006), ni d’origine française, ni originale dans ses fondements (Hirtt, 2009), elle se définit comme un mouvement de réforme ou les objectifs d’enseignement ne se définissent plus comme des contenus à transmettre mais plutôt comme des capacités d’action qu’un apprenant doit développer à partir d'un ensemble de savoirs, savoir-faire, savoir-être (Bosman et al., 2000), le but étant de pourvoir accomplir des activités dans une situation nouvelle appartenant à une même famille de tâches/situations.
Parmi les six postures évoquées précédemment, trois semblent plus particulièrement être adaptées à la mise en place de l’approche par compétences : la posture de l’accompagnement, celle du lâcher-prise et celle du magicien.
Dans la posture de l’accompagnement, l’enseignant laisse du temps à l’apprenant de comprendre (seul ou en groupe) le problème qui lui est soumis par une situation (authentique) proposée afin qu’il puisse trouver les réponses par lui-même en fonction de ses représentations. Cette posture offre les moyens à chaque étudiant de mobiliser ses propres savoirs, savoir-faire, savoir-être dans une situation donnée dont il se construit une représentation, et à laquelle il associe une résolution non présagée ni anticipée par l’enseignant.
Par la posture de lâcher-prise, l’enseignant responsabilise l’apprenant dans l’avancement du travail collectif et individuel, de ses choix et de leurs conséquences. Il donne ainsi les moyens à l’apprenant de mener une réflexion personnelle sur les possibilités qui lui sont offertes selon les contraintes qu’il perçoit, et celles qui peuvent apparaitre si les conditions évoluent.
Dans la posture du magicien, l’enseignant est amené à proposer des situations qui donnent de la crédibilité et du sens aux différentes activités soumises à l’apprenant. Il peut faire intervenir d’autres acteurs qui par exemple fournissent des témoignages présentant l’utilité de la situation proposée (anciens élèves, enseignants/formateurs d’écoles supérieures) ou faire intervenir des commanditaires externes (professionnels du métier, responsables de formations universitaires) dans la formulation de la consigne associée à la résolution d’un problème réel de terrain ou encore dans l’évaluation des livrables produits par les étudiants répondant à ce même problème.
Scénario pédagogique
Le portfolio et sa démarche réflexive
Que ce soit pour la planification d’apprentissages ciblés, la recherche d’un emploi ou la reconnaissance d’acquis et de compétences, le portfolio (ou e-portfolio dans sa version numérique) s’impose dans la mise en place d’une démarche de développement personnel et/ou professionnel en vue d’une insertion réussie ou d’une poursuite d’études. Dans ce sens, il se définit comme
« une collection d’informations numériques décrivant et illustrant l’apprentissage ou la carrière d’une personne, son expérience et ses réussites. Un e-portfolio est un espace privé et son propriétaire a le contrôle complet de qui y a accès, comment et quand ». (Cloutier et al., 2006 : 11).
La constitution d’un portfolio dans l’approche par compétences n’a pas vocation directe à faciliter l’insertion professionnelle. Il s’intègre plutôt dans une démarche d’évaluation réflexive visant à caractériser et positionner l’état de développement de chaque compétence pour chaque apprenant. Cette évaluation, mise en oeuvre idéalement par plusieurs enseignants, constitue une fenêtre (Touzel, 1993) sur la représentation de la compétence de l’étudiant et son évaluation. L’enjeu par cette analyse, est de faire progresser l’étudiant dans sa démarche d’auto-régulation qui se définit comme
« un ensemble de processus par lesquels les sujets activent et maintiennent des cognitions, des affects et des conduites systématiquement orientées vers l’atteinte d’un but » (Schunk, 1994 cité par Pierrot et al., 2021).
Le développement de la compétence et la mise en place d’une démarche réflexive ne constituent pas une entreprise solitaire. Ils se construisent par la confrontation à l’altérité, alternant temps d’échange et temps d’écriture. Par les temps d’échanges, cette démarche est reliée à la performance (Peters et al., 2017) dans le sens ou la réflexivité offre l’opportunité à l’apprenant de se connecter/reconnecter à un but personnel professionnel qu’il peut discuter, lui donnant confiance et fierté d’un parcours accompli. L’écriture, elle (Bibauw et Dufays, 2010) est individuelle. Venant après le temps d’échanges, elle se définit moins comme exercice réflexif en tant que tel, qu’un effort d’intériorisation, de mise en évidence de ce qu’a enclenché les échanges dans une confrontation antérieure remettant en question ou approfondissant (Bibauw, 2010) une notion ou une organisation personnelle.
Dans le scénario proposé, le temps d’écriture individuelle, servant de support à chacun des étudiants dans son développement (Chabanne, 2006) personnel, a été ponctué de temps d’échanges assurés au sein d’un groupe de travail facilitateur d’une confrontation cognitive et activateur de réflexions personnelles. Constitué d’un enseignant (pour un des groupes) et d’un ensemble d’étudiants appartenant à la même promotion, chaque groupe au cours de séances programmées ont échangé autour de la situation authentique (Situation d’Évaluation et d’Apprentissage) vécue par tous les étudiants. À partir de cette situation, ils ont identifié et formulé des traces d’apprentissage associés à chaque compétence posée dans le Programme National (PN).Ce temps collectif constitue « l’occasion d’une confrontation des points de vue et des expertises » (Cahour et Licoppe, 2010, p. 249). Chaque membre du groupe qui participe à ce temps d’échange a formulé des feedbacks formatifs questionnant l’étudiant sur ses preuves de compétences qu’il présentera ensuite (sous format visuel/audio/audiovisuel) dans son e-portfolio. Le but de ces groupes d’échanges était de faciliter les partages et les échanges (Poumay, 2017), de pousser chaque étudiant à une réflexion en profondeur sur ses propres traces de compétence et de sa modalité de déploiement telle qu’elle est envisagée dans une activité professionnelle future.
L’organisation des séances pour les étudiants DUT MMI
Le Diplôme Universitaire de Technologie spécialité Métiers du Multimédia et de l’Internet (DUT-MMI) a pour objectif de former (Bac +2) professionnellement des étudiants à la communication numérique : web design, infographie 2D et 3D, production audiovisuelle, développement de sites web et d’applications interactives.
Afin de faciliter la démarche de mise en place du portfolio imposé dans le cadre du BUT à partir de septembre 2021, nous avons proposé aux étudiants inscrits en DUT MMI en 2019-20 de réaliser un portfolio en prenant appui sur quatre activités extraites des différentes missions des étudiants inscrits en DUT-MMI seconde année en apprentissage[2]. Ces activités font référence à des situations authentiques pouvant être demandées à l’étudiant durant sa période de stage en entreprise (privée ou publique) et/ou ensuite lors d’une activité professionnelle que l’équipe pédagogique envisage. Ces quatre activités ont été menées en présentiel dans les locaux de l’IUT, par groupe de quatre étudiants, constitués sur la base du volontariat entre septembre en novembre 2020 :
- production d’un mot-croisés sur le thème du vocabulaire du multimédia, présenté dans un journal local à la rubrique jeux. Ce mot-croisés est commandité par le rédacteur en chef du journal Midi Libre ;
- rédaction d’une Newletter pour le compte de la bibliothèque de l’IUT de Béziers, informant ses abonnés de l’ouverture de ses nouveaux locaux et des différents services proposés (ex : modes de consultation des documents en ligne, des périodiques, des affiches, etc.). Cette Newletter a été demandée par le responsable administratif de l’Espace Michel Serres de l’IUT de Béziers ;
- conception d’une application numérique interactive à partir d’un texte littéraire étudié en classe de sixième. Ce texte est imposé par un éditeur de manuels scolaires d’où sont extraits les textes proposés ;
- production d’une capsule vidéo de 2 mn exposant une règle de grammaire ou d’orthographe française associé à un exemple de phrase et un exercice (Jacob-Thobois et Pélissier, 2019). Cette capsule a été demandée par une enseignante de Français du collège de Béziers en vue d’alimenter sa base de données de vidéos intégrées dans son cours d’orthographe aux élèves de sixième.
Chacune de ces activités étaient rattachées au module intitulé « Écriture pour les médias numériques » dont l’objectif est de sensibiliser les étudiants au vocabulaire du numérique et du multimédia, à des pratiques d’analyse et de conception de sites web/applications interactives et à la production de supports de communication numérique (hors réseaux sociaux).
Les productions (mots-croisés, newletter, application numérique, capsule vidéo de grammaire) étaient demandées comme une tâche professionnelle (posture du magicien) formulée à l’oral (et doublée sous le LMS-Moodle dans sa version écrite) par le commanditaire qui est venu présenter la situation en cours (en présentiel) ou a produit une vidéo de présentation mettant directement les étudiants en situation de production de livrables. Dans le cadre des cours d’après, les connaissances liées aux méthodes professionnelles et/ou aux savoirs nécessaires à la production de chaque livrable demandé par le commanditaire étaient présentées dans un cours magistral et. plusieurs travaux dirigés et/ou mis à disposition des étudiants (posture accompagnement) dans l’espace LMS-Moodle sous la forme de documents audio-visuels, textuels et/ou graphiques. Ainsi, l’étudiant avait la possibilité de consulter dès le début mais également tout au long de la période alloué à cette tache l’ensemble des documents fournis par l’enseignant, depuis plusieurs lieux et outils de connexion (ordinateur, tablette, téléphone, etc.). Il pouvait également rechercher par lui-même des documents (sur le web notamment), demander de l’aide à un ou plusieurs autres enseignants/professionnels, et/ou utiliser d’autres supports fournis lors de scénarios pédagogiques intégrés à d’autres modules de la formation (posture lâcher-prise).
Après le dépôt collectif du livrable demandé, quatre séances ont. structuré la démarche de conception/production du portfolio personnel :
La première séance a amener dans une premier temps chaque groupe d’étudiants à échanger entre eux sur les compétences qu’ils avaient selon eux développées durant la production de chaque livrable. Ces compétences étaient de trois natures : celles reliées au référentiel associé au BUT (hard skills), les compétences transversales (soft skills) et les compétences extra-professionnelles (mad skills) identifiées lors de différents ateliers organisés par le service qualité de l’IUT de Béziers (Pélissier et Di Gennaro, 2021). Ces listes de compétences étaient disponibles dans des documents déposés par l’enseignant sous Moodle et cela dès le départ du scénario pédagogique.
Dans un second temps, chaque étudiant était amené à écrire le contenu de son portfolio par rapport à sa propre activité (individuelle et non collective) discutée lors de la première séance : il devait y déposer les preuves de sa compétence (copie d’écran, contenu de feuilles volantes, extraits de documents collectifs, résultats de recherches réalisées sur le Web avec les mots clés ciblés et explicités, etc.) et proposer un texte personnel rappelant :
- le contexte de cette trace (qui faisait quoi à ce moment-là au sein du groupe) ;
- l’action réalisée (tâche collective à laquelle la trace choisie par l’étudiant est rattachée) ;
- les moyens mis en œuvre (stratégie personnelle mise en place) ;
- les raisons du choix liés à cette trace (lien avec la liste de compétences fournies et son projet professionnel personnel) ;
- le cadre dans lequel il pense pouvoir ré-exploiter cette compétence : identification de familles de situations en fonction de son objectif personnel professionnel.
La troisième séance a été consacrée à des échanges au sein de groupes. Elle a été divisée en trois temps : dans un premier temps un étudiant de chaque groupe présentait son portfolio (les différentes preuves selon ses compétences identifiées) au reste du groupe. Dans un second temps, les membres du groupe posaient des questions autour des trois familles de critères qualité d’un portfolio (Gauthier et al., 2006) :
- la pertinence : les membres du groupe interrogent l’étudiant sur les raisons de ses choix en matière de traces par rapport à son projet professionnel et font des propositions en prenant appui sur leur propre expérience. Ils proposent aussi des arguments supplémentaires pour conforter ou contrarier le choix de l’étudiant ;
- la cohérence : certains membres de groupe expliquent notamment la manière dont la trace sélectionnée par l’étudiant fait écho à une trace qu’ils ont eux-mêmes choisies (ou non) pour leur portfolio personnel. Ces commentaires témoignent ainsi de la cohérence de la sélection de la trace en fonction d’un ou plusieurs compétences, projets professionnels, mais aussi démontrent qu’une même trace peut être utilisée pour justifier plusieurs compétences selon l’argumentaire qui lui est associé ;
- le pragmatisme : des étudiants apportent des commentaires liés à l’esthétique du portfolio présenté. Les étudiants DUT-MMI reçoivent lors de leur formation des enseignements d’esthétique, d’histoire de l’art et d’ergonomie des supports de communication (2D et 3D). Ainsi, des arguments visant à améliorer un portfolio d’un point de vue graphique peuvent être apportés et débattus au sein du groupe ou chacun donne son avis et ses solutions esthétiques.
Durant la quatrième et dernière partie de la séance, chaque étudiant a retravaillé son portfolio, effectué des aménagements à partir des échanges qui se sont déroulés au cours de la troisième étape. L’étudiant ayant participé aux différents échanges s’interroge sur ses propres choix, revoit ses arguments et les modes de présentation de ses traces.
Méthodologie
Au niveau de l’évaluation des livrables des étudiants dans ce dispositif, nous avons dissocié l’évaluation réalisée par le commanditaire portant sur la production de chacun des quatre livrables et l’évaluation des portfolios. En effet, n’étant pas spécialiste des champs propres à chacun des professionnels commanditaires (journalisme, documentaliste/bibliothécaire, éditeurs de manuels scolaires et enseignants de Français au collège), nous ne sommes pas intervenus dans l’évaluation de ces livrables. Nous nous sommes centrés sur l’évaluation des portfolios, l’ensemble des notes prises par les étudiants au cours des différents échanges (première séance de portfolio) et l’analyse des portfolios eux-mêmes. L’analyse des portfolios a été menée à partir de la grille proposée par Lebel et Bélair (2004) qui s’organise autour de quatre niveaux et de sept critères[3]. Après l’avoir diffusée aux étudiants au début de l’expérience (posture lâcher-prise) en amont de leurs productions collectives (disponible sous LMS-Moodle), cette grille nous a servi de support à l’accompagnement et à l’évaluation finale du portfolio. L’usage d’un même outil à la fois pour la conception (grille donnée aux étudiants) et pour son évaluation (utilisée par l’enseignant) nous offre les moyens d’observer d’une part la démarche suivie par chaque étudiant et d’autre part de caractériser le résultat final déposé.
Les données recueillies lors de cette étude sont d’une part les 49 portfolios évalués pour chacun des sept critères composant la grille (note de 1 à 4 pour chaque critère) et d’autre part les notes prises par l’ensemble des participants lors des séances d’échange. Dans ce retour d’expérience, nous ne pouvions pas présenter l’ensemble des résultats. Nous présentons seulement l’analyse des notes formulées par les étudiants.
Nous avons récupéré l’intégralité les brouillons sur lesquels les étudiants ont pris des notes : 43 % comportent uniquement des dessins (liés au critère de pragmatisme de la grille) non interprétables pour l’enseignant sans entretien avec l’étudiant, 8 % présentent des écrits illisibles. Le reste (49 %) contiennent des mots ou des expressions : « pourquoi ? », « pas compris », « il faudrait dire ». Cela représente 86 documents analysés sur toute la période du dispositif. Plus particulièrement, en présentiel, nous avons récupéré les feuilles sur lesquelles les étudiants avaient inscrit leur commentaires (59 documents recueillis) et en distanciel, nous avons demandé le fichier personnel (27 documents) de chaque étudiant (sur la base du volontariat). Les notes de l’enseignant prises au cours des différentes échanges ont également été prises en compte pour ce travail : cela représente 9 pages d’écriture manuscrite (3 pages concernent les échanges qui ont eu lieu en présentiel et les 6 autres pages concernent la période en distanciel).
Résultats
Les résultats s’organisent autour de deux aspects : le premier vise à identifier les difficultés rencontrées et le second les changements de posture qui en ont découlé.
Trois catégories de difficultés
Des travaux listant les difficultés des étudiants face à la production d’un portfolio ont déjà été publiés (Poumay et al., 2019). Cependant, à travers l’analyse des notes remises par les étudiants et celles de l’enseignant, nous soulignons des catégories de difficultés qui nous ont amené à proposer des changements de posture durant la période de distanciel.
Trois catégories de difficultés ont été identifiées au cours de ce dispositifs. Certaines ont été présentes tout au long du dispositif mais d’autres se sont accentuées :
- l’utilité de la création de ce portfolio. Plus particulièrement, les étudiants soulignent :
1.1. leurs difficultés à voir la différence entre ce portfolio et leur CV. Ils demandent lors des temps d’échange « ou je dois mettre le CV dans ce portfolio ? », « ili faut mettre le CV avant ou après le portfolio ? » ;
1.2. leurs besoins de comprendre à quoi ce travail peut servir. Les étudiants inscrivent sur leur brouillon : « c’est n’importe quoi ce truc », « Pourquoi on fait ça d’abord ? » ;
1.3. ou encore leur difficulté à rentrer dans la démarche de production de trace de compétences qui n’a pas de sens pour certains étudiants. Les notes de l’enseignant soulignent : « j’y comprends rien », « c’est trop flou à faire », « on a déjà fait ça la semaine dernière » ;
Cette difficulté a été présente tout au long du dispositif. On aurait pu s’attendre à ce que l’éloignement physique des étudiants (dans le distanciel) provoque une prise en charge individuelle du travail de production du portfolio. Il n’en a rien été. Les commentaires recueillis dans la période en distanciel montrent tout le contraire : les étudiants ont été agacés et de plus en plus perdus face à la production du portfolio demandée. La grande majorité n’ont plus participé activement à distance aux échanges collectifs (80% environ) et une partie (15% environ) ont demandé à pouvoir présenter un CV à la fin duquel les 5 compétences (du programme national BUT) étaient illustrées par des réalisations finales collectives (les livrables produits par le groupe).
- difficulté liée à la mise en lien de leur production avec les compétences ciblées par la formation (cartographie proposée) :
2.1. leurs difficultés à comprendre la cartographie proposée : les étudiants demandent à l’enseignant lors des séances d’échange en groupe la signification de plusieurs items comme « faire preuve de leadership » ou encore « élargir sa culture » ;
2.2. leurs difficultés à mettre en lien leurs traces personnelles avec les compétences exprimées dans le référentiel : dans la pratique, ils assimilent compétences à savoir-faire (liées au livrable collectif déposé) et ne perçoivent pas qu’une même trace, selon le place qu’on lui donne dans son propre développement peut être relié à plusieurs compétences.
Cette difficulté a également présente tout au long du dispositif. Cela peut s’expliquer de par un besoin de temps d’appropriation des termes de la cartographie des compétences au fur et à mesure de l’avancée du travail d’analyse des traces personnelles associées à chaque livrable réalisée. Durant la période en distanciel, cette difficulté ne s’est pas aggravée mais plutôt maintenue. Au cours des échanges, les questions portaient sur les mêmes compétences : les étudiants qui n’écoutaient pas forcément les questions posées par les uns et les réponses fournies par les autres (apprenants ou enseignants). Ils ne parvenaient pas à capitaliser les réponses d’une séance d’échange à l’autre ni à nourrir leur propre réflexion sur leur portfolio.
- difficultés à comprendre la grille d’analyse fournie :
3.1. le vocabulaire des critères n’est pas connu des étudiants. Les étudiants disent : « il y a des trucs que je ne comprends pas la-dedans », « c’est quoi la différence entre envergure et profondeur », « on ne vous a pas demandé de bien rédiger (critère de la langue) dans le portfolio si ? » ;
3.2. une trace est difficilement analysable par les étudiants selon tous les critères : « cette copie d’écran, je peux la mettre dans la précision et dans l’originalité » ou encore « je ne sais pas où la classer, un peu dans la langue et un peu dans l’envergure ».
Cette difficulté présente tout au long du dispositif, s’est amoindri en distanciel. La grille, ne constituait pas pour certains étudiants, une aide à la production du portfolio mais plutôt une contrainte supplémentaire dont les difficultés de lecture se sont peu à peu estompées en présentiel. Cependant, durant, la période de distanciel, les difficultés de d’incompréhension de la grille ont refait surface comme au tout début du dispositif. La mise à distance des échanges et de la production individuelle du portfolio a ramené les étudiants au point de départ du dispositif ou de nombreuses questions sur les critères ont été largement à nouveau abordés.
Des changements de postures
Afin de faire face à ces difficultés, des changements de posture de l’enseignant ont été réalisées au cours du dispositif en distanciel.
Premièrement, en ce qui concerne l’utilité de la création de ce portfolio, les étudiants formulent s’être trouvés relativement perdus. Certains étudiants disent lors des ateliers avoir consulté de nombreux sites web pour trouver l’inspiration mais n’avoir trouvés aucun exemple de portfolio correspondant à leur discipline. Ils souhaitaient des exemples auxquels « se raccrocher très vite » disent-ils.
Au cours du dispositif à distance, la question de leur fournir des exemples de portfolio appropriés à leur discipline restait entière car nous n’avions aucun exemple en lien avec le BUT MMI à leur fournir. Par ailleurs, l’APC inscrit les étudiants dans une démarche personnelle par laquelle il s’agit de créer mais pas de re-créer des choses existantes (recopie d’exemples). Fournir des exemples aurait amené les étudiants à effectuer un copier-coller non envisageable. Une solution a donc été de proposer la mise en place d’une posture d’enseignement au cours de laquelle l’enseignant a formulé un bilan des commentaires de l’ensemble des étudiants qui faisait ressortir la différence entre le CV et le portfolio (cf. difficulté 1.1), rappelait la vocation du portfolio dans le cadre du BUT (cf. difficulté 1.2) et reprenait les caractéristiques des traces évoqués dans le cadre de l’atelier par l’ensemble des membres du groupe (cf. difficulté 1.3).
Deuxièmement, les étudiants ont dit rencontrer des difficultés à s’approprier la démarche qui consiste à formuler leurs propres traces de celles qui ont été produites collectivement.
Afin d’aider au mieux les étudiants, l’enseignant a donc fait le choix dans le dispositif à distance de mettre en place une posture de contrôle. En particulier, il a illustré (à deux reprises) à tous (avec le partage d’écran en visio-conférence) l’ensemble des compétences présentes dans la cartographie (cf. difficulté 2.1) en prenant appui sur des productions collectives antérieures détaillées. Classée par versions successives, par étudiants-auteurs des différents composants, par applications utilisées (ex : Photoshop, Illustrator, Word, Powerpoint, etc.) et supports de représentation choisies (textuel, audio, audio-visuel), l’enseignant a également spécifié des exemples de traces et les a associées à des compétences visées (cf. difficulté 2.2). Ainsi, il a reposé les bases d’un collectif sur des activités passées connues de tous mais hors contexte.
Troisièmement, en ce qui concerne la réflexion sur les critères de production et d’évaluation des traces intégrées au portfolio (cf. difficulté 3), les étudiants ont proposé la mise en place d’un glossaire des critères.
Une suggestion d’un étudiant est de mettre à la disposition de tous des petites vidéos consultables à n’importe quel moment, extraites du web, permettant tout au long du dispositif et plus particulièrement dès le début des quatre activités demandées de pouvoir se construire une idée de la signification de ces critères. Il s’agit là d’une proposition intéressante d’un point de vue de l’APC ou l’enseignant n’intervient pas comme transmetteur mais plutôt comme collectionneur (posture magiciens) de productions produites par des acteurs extérieurs et organisées par les étudiants eux-mêmes. Enfin, afin d’aider chaque étudiant à produire de façon individuelle les traces de sa compétence, l’enseignant a demandé à distance à chaque étudiant de déposer une trace selon une fréquence prescrite (posture de lâcher-prise) dans une temporalité large. Lorsque ce dépôt n’était pas réalisé, l’enseignant posait alors des questions et/ou formulait des exemples de réponses à la place de l’étudiant (posture de contre-étayage).
Discussion : des limites de l’étude
Les résultats de cette étude nous ont permis de mettre en avant plusieurs difficultés et plusieurs postures conséquentes à ces difficultés. Cependant, ses résultats doivent être nuancés à plusieurs niveaux.
Premièrement, les difficultés formulées par les étudiants au cours des différents étapes d’avancement du scénario pédagogique ont constitué des éléments déclencheurs de changements de postures de la part de l’enseignant. Ces changements n’ont pas été anticipés et ne pouvaient pas l’être compte tenu de la nouveauté de l’approche et du fait qu’ils sont survenus après une formulation de la part des étudiants et/ou l’analyse de leurs écrits. Ce type de travail d’analyse constitue aujourd’hui un point de départ qui pourrait permettre de mieux appréhender les difficultés et de proposer des postures mieux appropriées, aussi bien en présentiel qu’en distanciel.
Deuxièmement, en ce qui concerne le distanciel, les données récupérées n’ont pas permis de spécifier des postures propres à la mise à distance d’un accompagnement d’un portfolio car les données recueillies n’avaient pas été formatées dans ce sens. En effet, l’enseignant, responsable du cours, pensait que l’année universitaire 2020-21 allait se dérouler en présentiel et que la pandémie était derrière nous. Aucun instrument de mesure n’a donc été mis en place spécifique au deux dispositifs (présentiel et distanciel). Par cette expérience, nous voyons toute la nécessité d’envisager de nouveaux travaux qui amèneront l’enseignant à changer de posture selon le dispositif mis en place (d’un présentiel au distanciel ou inversement), en vue de pouvoir s’adapter expressément à de nouvelles contraintes organisationnelles.
Conclusion
Demander à un étudiant inscrit en première année universitaire de rendre compte de ses compétences acquises durant un cours par la présentation et l’organisation de traces dans un portfolio dont la constitution a débuté en présence et s’est terminé à distance, a constitué une tâche complexe et inédite à la fois pour lui mais aussi pour l’enseignant.
À l’origine du dispositif, trois postures enseignantes (posture d’accompagnement, de lâcher-prise et du magicien) avaient été envisagées comme répondant aux principes de l’approche par compétences mise en œuvre dans le cadre du BUT MMI. Cependant, à partir de novembre 2020, lors de la mise en place du dispositif à distance, certaines difficultés des étudiants se sont agravées (cf. difficulté 1), d’autres se sont maintenues (cf. difficultés 2) et d’autres enfin qui s’étaient atténués lors du présentiel ont réapparus (cf. difficultés 3). Pour faire face à ces besoins, des changements de postures ont été mis en place à distance : posture de contrôle, de contre-étayage, d’enseignement. Ces trois postures viennent compléter les trois autres postures initialement choisies par l’enseignant pour ce dispositif. Cette diversité et leurs combinaisons montrent tout le chemin qu’il reste à parcourir pour notifier le déploiement d’un dispositif répondant à des attentes apprenantes individuelles mais aussi à la dynamique de groupes indispensables à la production de chaque portfolio.
Par cette étude, nous espérions nourrir la réflexion collective des enseignants de l’équipe du département de formation IUT-MMI dans la mise en place du BUT. Malheureusement, les difficultés rencontrées par les étudiants au cours de cette expérience et les questionnements liées aux postures mises en oeuvre soulèvent aujourd’hui plus d’interrogations que de solutions. Une discussion collective autour des opportunités pouvant apparaitre par la mise à distance de l’approche par compétences constitue un important chantier à explorer. Une réflexion sur les postures elles-mêmes (en présentiel et à distance) mais aussi sur la forme qu’elles peuvent prendre en présentiel et à distance ainsi que sur leur combinatoire au cours de laquelle plusieurs enseignants pourront participer, est à envisager.
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